Maroc Tafedna !

 

 

Tafedna, c’est une parenthèse hors du temps sur la côte atlantique marocaine. À mi-chemin entre Essaouira et Agadir, ce petit village de pêcheurs se love au creux d’une baie protégée, entourée de falaises ocre et de collines couvertes d’arganiers. Pas de tourisme de masse ici : seulement une longue plage de sable blond, des barques bleues tirées sur le rivage, le cri des mouettes et l’odeur du poisson grillé qui s’élève des maisons blanches.

C’est un lieu où la vie bat doucement : les pêcheurs partent tôt le matin, les enfants jouent sur la grève, les voyageurs trouvent refuge dans quelques auberges simples, face à l’océan. Tafedna séduit par son authenticité et sa quiétude, une escale idéale pour qui cherche le Maroc encore brut, loin des circuits balisés.

En somme : Tafedna, c’est le Maroc de l’Atlantique dans sa plus pure simplicité — une rencontre entre la mer, la terre et les hommes, où l’on respire la beauté sauvage et la lenteur précieuse du temps.

 

 

Jamila !

 

Elle portait sa maternité comme on porte une épreuve.... Quatre fois déjà, la vie s’était éteinte dans son ventre avant même d’avoir le temps de s’épanouir.

À chaque grossesse, c’était le même cauchemar : un virus inconnu qui se réveillait, comme un fauve tapi dans le fond de son ventre, rongeant ses forces, consumant ses espoirs. Puis, sitôt le drame survenu, le mal disparaissait, comme si son corps, dans une cruauté implacable, ne voulait pas partager la vie.

Cette fois pourtant, malgré les fièvres, les douleurs, les interminables journées pliée en deux sur un tapis de paille, Jamila a tenu. Sans médicaments, sans médecin, seulement avec ses mains serrées sur son ventre et ses prières murmurées au milieu des nuits. Aller à Agadir, à deux cents kilomètres plus où moins, relevait du rêve inaccessible : le prix du voyage, le coût des soins, et cette sécurité sociale fragile comme un fil, liée au maigre salaire de son mari pêcheur, ne suffisaient pas. Alors elle a attendu, seule, la sueur collée au front, assise des heures durant comme pour empêcher son enfant de lui échapper encore.

Et voilà qu’aujourd’hui, dans ses bras, contre sa poitrine creusée, il y a ce petit corps tiède, ce souffle léger. Son bébé. Le miracle arraché à la fatalité. Les femmes du village disent qu’elle a triomphé, qu’elle a brisé la malédiction. Jamila ne dit rien. Elle caresse le visage minuscule, ferme les yeux, et savoure ce silence nouveau en elle : plus de fièvre, plus de poison. Juste la paix fragile d’une mère qui, pour la première fois, n’a pas perdu.

 

 

 

 

Jamila....

   ..... La naissance du bébé !

 

 

Après toutes ces épreuves et ces quatre fausses couches douloureuses, Jamila, le grand bonheur est enfin arrivé !

Ce beau bébé tant attendu par vous deux. Tu as accouché, tu vas mieux aujourd’hui, et le bébé semble se porter à merveille.

Merci de m’avoir envoyé sa photo par WhatsApp, cela m’a beaucoup touché. J’espère que nous aurons toujours des nouvelles de vous et du petit.

Restons en contact, et sachez que nous ferons de notre mieux pour vous aider, autant que possible.

 

Nous sommes tellement heureux pour vous tous !

 

 

 

 

Nadjet...

     .... A l'heure de la vaisselle !

 

 

Najette son regard porte une mélancolie ancienne,comme si chaque ride avait été tracée par le vent du désert et les épreuves de la vie. Dans sa maison dépouillée, presque vide, où l’essentiel se résume à quelques tapis, une jarre d’eau et le pain qu’elle pétrit chaque matin, elle incarne une dignité farouche. Elle n’a presque rien, et pourtant elle donne. Elle offre le thé avec lenteur, comme on offre un morceau de soi. Sa souffrance ne crie pas, elle se devine dans le silence de ses gestes, dans ses mains usées qui continuent pourtant à façonner la vie. Dans le manque, elle reste debout, droite, souveraine. Et c’est dans cette simplicité nue, dans cette douleur muette mais digne, que réside sa véritable grandeur.

 

 

 

 

Radija !

 

Une rencontre totalement fortuite au bord d’un chemin. Elle descendait depuis le village de Tafedna, sa petite maison derrière elle, accompagnée de son âne Riu chargé du linge sale de la famille et de nombreuses couvertures qui servent de matelas étalées sur le sol parfois de terre brute ici de béton, le chargement de la semaine, qu’elle allait laver à la rivière, sur le pont.

C'est là que nos chemins se sont croisés....!

On s’est arrêtés, on a rigolé ensemble, échangé quelques mots, et on lui a demandé si elle accepterait de nous laver le peu de linge que nous avions  dans le fourgon, trois ou quatre t-shirts, deux ou trois shorts. Avec un sourire franc, elle a dit oui. Et de là est parti…

Un lien simple et précieux, tissé dans l’échange et la générosité, l'entraide...

 

 

 

 

Radija !

 

Toi la mère silencieuse mais présente, toujours en arrière-plan mais qui veille sur chacun.

Tes mains vont et viennent entre la cuisine, les enfants, les tâches innombrables. Tu observes Mohamed, fière et attentive à son rôle de petit chef, mais aussi protectrice de tes filles, veillant à ce qu’aucune ne manque de rien.

D’un regard seulement, tu rappelles à Mohamed qu’il ne doit pas abuser de son autorité, que le respect s’exerce dans les deux sens. Tu glisse en douce une bouchée de couscous vers la petite dernière, essuie la bouche de l’une, replace le voile sur les cheveux de l’autre. Tu tiens l’équilibre subtil entre la tradition et ce fils élevé comme chef et l’amour maternel, qui, lui, ne fait pas de hiérarchie.

Dans la maison, c’est toi la véritable colonne vertébrale, mais tu n’en dit rien. Ta force est discrète, ta voix douce, pas toujours et ton autorité invisible.

C’est toi qui, par sa patience et ton abnégation, fait tourner ce monde minuscule mais essentiel.

 

 

 

 

 

 

Mohamed six ans !

 

Le fils, Mohamed, est élevé dans la pure tradition marocaine. Dès son jeune âge, il décide déjà des responsabilités qui font de lui presque le chef de famille lorsque son père part à la mer, à la pêche.

Tout doit passer par lui c'est comme cela que ces parents et lui voient les choses, un comportement de petit homme très autoritaire et très désagréable voir violent lorsqu'il n'obtient pas ce qu'il veut. Ses petites sœurs, parfois, attendent qu’il ait fini de manger avant de commencer, c'est comme cela que sa mère l'élève car c’est ainsi que se transmet le respect dans la maison.

À table, il est servi le premier jusqu'à ce qu'il soit repu, il ne voit que par lui en premier, parfois il a un petit geste de partage avec ses soeurs où ses cousins et cousines mais c'est rare, d'autres fois le petit enfant qu'il est vient nous mendier un câlin puis sa violence et son instinct sauvage reprennent le dessus. Un mélange étrange de douceur et d'autorité.

Quand il y a un différend entre ses sœurs, c’est lui qui tranche, d’un mot posé ou d’un geste simple. Même les voisins savent que Mohamed « porte la maison » quand son père est absent. Et pourtant, malgré cette responsabilité précoce, il garde la spontanéité et la malice de l’enfance , un sourire, un clin d’œil, un petit mot drôle qui fait éclater la tension d’un conflit.

Ainsi, il grandit, tissé entre la rigueur de la tradition et la chaleur de l’enfance, déjà chef, déjà pilier, mais encore enfant.

 

 

 

 

 

Frères et sœurs, cousins cousines, copains copines se retrouvent pour jouer dans le patio !

 

 

Le bonheur des enfants qui n’ont rien m’a toujours frappé. Ils n’ont ni écrans, ni jouets sophistiqués, ni vitrines pleines de promesses. Et pourtant, dans une rue poussiéreuse, sur un chemin de montagne ou dans une chambre nue, ils inventent des mondes entiers avec presque rien. Une boîte devient un camion, une pierre un trésor, un chiffon un ballon.

Leurs éclats de rire résonnent, purs, sans fardeaux. Ils jouent avec l’air, le vent, la liberté de leurs corps. Ils courent, ils s’inventent, ils rêvent sans barrières. Et dans leurs yeux brille une joie que l’on oublie trop souvent dans nos vies encombrées d’objets.

Ils sont heureux, libres, souverains dans leur pauvreté apparente. Leur royaume, c’est l’imagination, et leurs richesses, ce sont les liens qu’ils tissent entre eux.

 

 

 

 

 

 

Voilà, l’assiette de Mohamed est prête !

 

La traditionnelle semoule de couscous, quelques patates fumantes posées au sommet, pas de viande, trop chère, nous sommes dans une famille de pêcheur et lorsque la pêche est bonne c'est poisson a volonté.

Comme toujours, il est le premier servi. Il plonge sa cuillère avec appétit, goulûment, presque sauvagement, comme s’il voulait dévorer le monde entier dans ce plat. Les grains de semoule collent à ses joues, ses doigts impatients ramassent ce qui échappe de la cuillère. Il mange vite, avec l’assurance de celui qui sait que tout lui revient de droit.

Et pourtant, derrière ce geste presque autoritaire, on retrouve l’enfant qu’il est encore, ses yeux brillent, il rit quand un grain de couscous se coince dans ses dents, il pousse du coude sa petite sœur qui, en douce, s’approche trop près de son assiette.

Un instant, on oublie le futur chef de famille, le garçon investi d’un rôle trop grand pour son âge. On ne voit plus que l’enfant, gourmand, insouciant, heureux de manger à sa faim.

 

 

 

 

Voici la dernière née...

   ......la petite sœur de Mohamed !

 

Comme partout, elle est la chouchou, celle qu’on dorlote, qu’on cajole, celle dont les caprices passent avant les règles. Elle n’a pas besoin d’attendre que Mohamed ait fini de manger, on lui glisse toujours une bouchée dans la main, une patate tendre écrasée dans un coin de l’assiette, un grain de couscous ramassé du bout des doigts.

Ses grands yeux rieurs observent Mohamed avec une admiration mêlée d’espièglerie. Elle sait qu’il est « le chef », mais elle aussi connaît son pouvoir,  un sourire, un éclat de rire, et même Mohamed, l’autoritaire, ne peut s’empêcher de lui céder un morceau.

Elle représente l’enfance pure, protégée du poids des traditions, celle qui ramène de la légèreté au sein de la maison.

 

 

 

 

La grande sœur de Mohamed !

 

Et puis, il y a la grande sœur de Mohamed. Toujours en retrait, presque effacée, elle se fond dans l’ombre du quotidien. Introvertie, discrète, elle s’installe dans un coin de la pièce, ses mains occupées à des petits gestes qui la rassurent, plier un tissu, lisser une natte, faire ses quelques devoir d'école, aligner des objets tombés sur le sol.

Elle n’ose presque jamais demander quoi que ce soit. Même lorsqu’elle a faim, sa voix est à peine un souffle, elle attend qu’on pense à elle, qu’on lui tende une bouchée, qu’on lui fasse signe. Elle n’est pas maltraitée, non, simplement oubliée parfois, comme si sa discrétion la rendait invisible.

Et pourtant, dans ses yeux brille une douceur unique, une profondeur qui capte ceux qui prennent le temps de la regarder. Elle observe plus qu’elle ne parle, elle écoute plus qu’elle ne réclame.

Sa force est là, silencieuse, cachée, mais bien réelle.

 

 

 

 

Des maisons rustiques et rudimentaires !

 

Ici, les maisons sont faites avec ce que donne la montagne et les alentours, des pierres ramassées, de la terre pétrie, un peu de boue, du bois récupéré, des troncs qui deviendront poutres pour soutenir les toits de terre. Chaque maison est comme un morceau du paysage, sortie de la main des habitants, rustique mais vivante.

Un fil, une ampoule, et voilà la lumière qui éclaire les soirées. L’eau coule d’un simple robinet, autour duquel toute la famille se rassemble pour boire, se laver, remplir les seaux. Cela devient un lieu de passage, de petites conversations, de rires aussi. Les toilettes, simples et à la turc, font partie de ce quotidien sans luxe, mais où tout s’organise avec ingéniosité.

L’électricité, on la recharge avec une carte lorsque l'on a un peu d'argent et quand la carte s’épuise, la maison s’endort dans l’ombre. Mais lorsqu’elle revient, la lampe s’allume, et c’est comme une fête, une petite victoire sur la nuit.

 

 

 

 

L'enfance au village !

 

 

Ici, les enfants n’ont presque pas de jouets mais qu’importe ! Avec trois bouts de chiffon, ils inventent des poupées. Un ballon perdu dans la poussière suffit à faire courir tout un hameau derrière lui. Leurs jeux sont ceux de la rue, des chemins et des cours, toujours bruyants, toujours remplis de rires. On se bouscule, on se chamaille, on se tire par la manche, et l’instant d’après, on grimpe déjà dans un arganier ou on file comme le vent à travers les sentiers.

Les pierres deviennent des obstacles à franchir, les murets de pierre des forteresses à conquérir. Chaque coin de terrain est un terrain de jeu. Et quand il faut aller chercher de l’eau, rapporter du bois ou aider au champ, cela devient encore une aventure. On porte, on transporte, mais toujours en riant, toujours en courant.

Ici, l’enfance n’a pas de jouets elle a l’énergie, l’imagination et le soleil pour complices.

 

 

 

 

 

C'est beau la vie !

 

La vie, beauté, pure, libre. Elle coule sans chaîne, sans peur comme un ruisseau qui chante aux pierres. Chaque souffle est un éclat de lumière,
chaque instant, un parfum de ciel. Même dans l’ombre, la vie est belle et sa douceur se glisse dans nos mains.

Libre de rire, libre de pleurer, libre de marcher pieds nus sur la terre chaude, libre de rêver, de tomber, de se relever… La vie est un souffle, fragile et puissant et dans ce souffle, tout est beauté.

 

 

 

 

 

 

Chaque matin, les jeunes pères de famille se retrouvent au port. Les maris de Jamila, de Khadija, de Nadjet.

 

 

Ils sont pêcheurs, fils et petits-fils de pêcheurs. Mais aujourd’hui, plus que la mer, c’est l’attente qui les nourrit.


Ils attendent la météo. Ils attendent le beau temps. Ils attendent que la mer veuille bien leur donner un signe, un peu de poisson. Des heures entières passées à préparer les filets, à réparer une corde, à caresser du regard leurs barques usées. Des heures d’espoir, suivies souvent d’un retour bredouille.

Il faut désormais aller loin, toujours plus loin. Trois heures de bateau avant d’espérer jeter les casiers au large, à la saison du poulpe. Et encore, rien n’est garanti. Le reste du temps, c’est le vide, la mer stérile, l'arrêt forcé et sans indemnité de chômage.

Quand il n’y a pas de pêche, il n’y a pas de paye. Il n'y a pas non plus de dettes qui s’accumulent, juste on attend que la mer soit bonne, que la météo soit clémente pour espérer faire un peu d'argent qui serviront pour la famille et les améliorations de la maison lorsque cela est possible, mais ça fait bien des années que l'on ne fait aucun travaux dans les maisons, quatre murs de pierres, parfois de parpaings, un toit suffisent à l'essentiel, tenir sa famille à l'abri.

les femmes comptent chaque pièce au marché, et les enfants qui grandissent avec la mer pour horizon, mais sans certitude d’y trouver un avenir.

 

Et pourtant, la vie ne se réduit pas à cette fatigue. Dans les maisons, il y a la chaleur des familles. Jamila, Khadija, Nadjet, toutes les femmes gardent la maison vivante. Elles font le pain, partagent les repas, veillent sur les enfants. On vit ici comme on a toujours vécu, ensemble.


Les grands-parents, les parents, les enfants, tous sous le même toit, autour d’un patio où tout se croise, les rires, les histoires, les disputes parfois, mais toujours la complicité.

C’est une vie simple, dure parfois, mais tissée d’amour, de solidarité et de respect des anciens. Et même quand la mer se montre avare, c’est la maison qui nourrit les cœurs !